Alexandra Tassoul: L’amour de soi #34
Alexandra Tassoul – Témoignage: L’amour de soi.
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Dans cet épisode du podcast “Entr’Nous“, nous vous proposons le témoignage d’Alexandra Tassoul. Elle nous partage le chemin qui l’a conduite à s’accepter et s’aimer alors que dès le départ, rien n’était gagné.
Alexandra Tassoul est thérapeute de l’Amour de Soi, psycho/sexologue de formation. L’amour de soi est un élément central de notre bien-être physique et psychologique. Ne pas s’aimer, ne pas s’écouter, ne pas reconnaitre sa propre valeur et ses qualités, c’est un chemin trop souvent emprunté qui entraine souffrances et malaises profonds. L’intégralité de notre vie s’en ressent et bien entendu ceci inclut la sexualité, et la relation à l’autre dans sa globalité.
Mais pourquoi éprouvons-nous de la difficulté à nous aimer ? Pourquoi est-ce parfois si difficile de nous sentir en paix avec nous-même ? De s’alléger des poids que l’on porte ? Ou tout simplement, de vivre une vie harmonieuse et une sexualité épanouie ?
Si l’amour de soi semble si lointain et en même temps représente un tel besoin, c’est qu’il touche à notre histoire, à notre essence et notre connexion au monde et aux autres.
Dans un monde où l’on tente de gommer toute imperfection, où l’apparence et l’appartenance à la norme semblent être devenues des nécessités, être soi-même, être différent et parvenir à s’aimer comme tel peut être un parcours du combattant.
Alors, faut-il être guerrière, résignée ?
Et si la solution se trouvait juste en face de nous ? Ou plutôt, à l’intérieur de nous ?
Et si le secret commençait par s’aimer tel que nous sommes et accepter nos différences ? Mieux : en faire une force, une beauté et pourquoi pas, une mission. Les souffrances sont-elles vraiment le fruit du hasard ? Nous aident-elles à grandir et à trouver notre voie… ?
Alexandra Tassoul nous partage avec authenticité son histoire de vie et la beauté de son témoignage nous amène doucement, avec tendresse, à une gratitude, une ode à la vie…
Séquençage du podcast avec Alexandra Tassoul:
- 00:20 Introduction & présentation de notre invitée : Alexandra Tassoul
- 00:58 Quelle est l’intention d’Alexandra en participant à ce podcast ?
- 02:10 Comment Alexandra définit-elle la sexualité ?
- 03:29 Au tout début
- 04:57 Le lien avec la sexualité
- 06:33 Les moments charnières qui ont modifié la situation
- 09:26 La place du reste de la partie du corps, le corps féminin
- 10:58 L’attirance pour soi et pour les autres
- 12:32 7 opérations : de l’espoir à l’acceptation
- 14:52 Comment se passe la transition ?
- 15:54 Quelle est la place de la sexualité dans ce rapport au corps ?
- 16:47 Comment cela évolue ?
- 20:16 Quels sont les questionnements et leurs réponses ?
- 23:41 L’homme est un être social : choisir les bonnes personnes autour de nous c’est fondamental
- 25:26 Vie sentimentale, vie sexuelle… comment était le lien entre les deux ?
- 27:11 Actuellement, où en est Alexandra dans sa vie sexuelle ?
- 27:54 Pourquoi devenir sexologue ?
- 28:39 Qu’est-ce qu’Alexandra a envie de partager d’autre ?
- 30:45 Un cadeau à offrir aux auditeurs, un conseil
- 32:58 Gratitudes
- 34:16 Clôture du podcast
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Liens concernant Alexandra Tassoul:
Transcription des échanges avec Alexandra Tassoul:
00:00 Générique Intro sur tapis musical :« Entr’Nous (voix féminine Katalin) ; Entr’Nous (voix masculine Olivier), le podcast (Katalin) pour parler (voix masculine Michel) de sexualité (Olivier) par vous (Michel), avec vous (Olivier), pour vous (Katalin) »
00:20 Olivier Mageren : Bonjour, bienvenue dans le 34e épisode du podcast « Entr’Nous , le podcast du Love Health Center : le premier Centre européen dédié à la sexualité et à la relation. Alors aujourd’hui j’ai le grand plaisir d’avoir au micro Alexandra Tassoul, bienvenue.
00:34 Alexandra Tassoul : Merci Olivier, merci beaucoup de m’accueillir dans ton podcast
00:37 Olivier Mageren : Et est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?
00:39 Alexandra Tassoul : Bien sûr, je suis Alexandra Tassoul, psychologue, sexologue. Et surtout thérapeute de l’amour de soi. Et donc j’accompagne les hommes, les femmes, les couples, peu importe, en tout cas à cheminer vers l’amour de soi, l’amour des autres. Se sentir bien avec soi-même et bien dans ses relations en général, voilà.
00:58 Olivier Mageren : D’ailleurs si ça vous parle déjà l’amour de soi. Je vous invite à découvrir ce qu’Alexandra publie sur les réseaux sociaux, sur internet. On voit que c’est sa passion, elle en parle avec beaucoup de nuances, de finesse, de détails auxquels on ne pense pas toujours. Parce que définir l’amour de soi ce n’est pas toujours évident et quand c’est sa passion évidemment ça va permettre de guider les gens. Vers eux-mêmes et de rayonner au plus beau de leur plus belle énergie. Je vous invite à découvrir son site internet qui sera dans les liens, dans l’article du podcast. Est-ce que tu peux nous partager quelle est ton intention en enregistrant ce podcast ?
01:28 Alexandra Tassoul : Alors mon intention c’est vraiment de partager mon histoire avec honnêteté et vulnérabilité. Parce que je pense qu’on a tendance, dans la société, à vouloir toujours montrer ce qui va bien, tout ce qui est beau, tout ce qui fonctionne. Or on est tous des êtres humains, on a tous des difficultés, des mal-être. Et ça fait du bien aussi d’avoir du partage par rapport aux parts d’ombres, à la vulnérabilité, aux difficultés. Et c’est vraiment un message d’espoir que j’ai envie de transmettre parce, avec toute ma vulnérabilité, je vais vous transmettre aussi que : on peut y arriver et on peut s’aimer profondément alors que ce n’était pas gagné du tout, du tout, du tout. Donc c’est ça mon attention aujourd’hui, c’est vraiment un partage, en toute transparence, et avec beaucoup d’espoir et d’amour.
02:10 Olivier Mageren : Merci de faire ce témoignage. Donc vous l’aurez compris le podcast cette fois-ci n’est pas dédié à une thématique, ça aurait pu être sur l’estime de soi, l’amour de soi. Avec Alexandra on a mutuellement décidé de faire un témoignage en fait et de parler de soi et donc effectivement pour créer un monde plus beau. Ça parle de l’humain et d’être tel qu’on est, dans ses forces, ses faiblesses, ses difficultés, ce qui va bien, ce qui va moins bien. Et aujourd’hui évidemment, c’est ce qu’on a choisi de faire, c’est de témoigner. D’ailleurs si ça vous intéresse, de manière régulière on fait des podcasts de témoignages et donc vous pouvez aussi nous contacter si vous avez envie de témoigner de votre propre expérience et vie sexuelle. Et juste avant de rentrer dans la thématique et ton histoire personnelle, est-ce que tu pourrais nous définir pour toi ce qu’est la sexualité, telle que tu la perçois aujourd’hui ?
02:53 Alexandra Tassoul : Alors la sexualité je la perçois aujourd’hui comme un des langages de l’amour. Mais pas seulement. Mais notamment, vraiment un langage de l’amour puissant, c’est une façon d’être avec soi. Parce qu’il y a aussi la sexualité avec soi-même. Et une façon d’être avec l’autre, se donner de l’amour, du plaisir, d’éveiller nos sens, pour moi c’est vraiment un langage profond de l’amour. Et c’est aussi une façon d’être en lien, une façon de connecter à l’autre, de connecter parfois au divin, d’être dans des états différents, de plaisir, de conscience et donc je dirais, oui, avant tout un langage de l’amour et puis un langage de connexion.
03:29 Olivier Mageren : Merci. Alors, à propos de ton histoire personnelle, ton histoire sexuelle, par quelle phase en fait souhaites-tu démarrer ?
03:36 Alexandra Tassoul : Alors je pense que l’idéal c’est de revenir au point de départ, c’est-à-dire à la naissance, dans mon cas en tout cas. Ce qui a façonné mon histoire c’est la malformation que j’ai au visage à la naissance. Pour expliquer un petit peu, je pense que pour une meilleure compréhension de ce que j’ai, de qui je suis, je vais vous expliquer du coup de quoi il s’agit. Donc quand je suis née, il y avait sur mon visage une petite veine apparente. Couleur mauve-bleu, plutôt mignonne à priori, voilà. Rien de grave parce qu’il y a beaucoup d’enfants qui naissent avec un angiome, des petites déformations veineuses, et puis ça part, avec le temps ou pas, mais en tout cas voilà… Dans mon cas c’est ce qu’on a cru au tout départ et puis au fil des mois, au fil des années, c’est une malformation qui a pris de plus en plus de place. C’est à dire que, la petite veine qui était toute seule est devenue plusieurs veines, en amas si tu veux. Coloré, et puis de plus en plus volumineux. Et qui a pris de l’espace pour s’étendre donc au niveau de ma joue, au niveau de mon œil. Pour situer un petit peu au niveau de mon sourcil intérieur, juste au-dessus de mon œil, j’ai commencé à avoir tout doucement une grosseur qui se développait. Au niveau de mes lèvres, de ma lèvre supérieure, il y avait aussi un amas de veines et cetera et donc, voilà. En fait depuis le départ il y a eu à ma naissance une petite veine qui au fil des années s’est vraiment développée puisque tout ce qui est veineux, c’est vivant, et donc le point de départ c’est ma naissance et le démarrage avec cette malformation veineuse au visage.
04:57 Olivier Mageren : Et comment tu le lie spécifiquement dans ton histoire par rapport au fait que c’est intimement lié à ton histoire sexuelle en fait ?
05:03 Alexandra Tassoul : Alors je le lie à mon histoire parce qu’au départ ça a été l’horreur. Vraiment au départ je me détestais…. Totalement. En fait je n’avais aucune estime, aucun amour de moi-même. J’ai vraiment commencé ma vie en me détestant profondément. En vivant des moments très compliqués par rapport au rapport que j’avais avec moi-même. Alors je vais l’expliquer par la suite, heureusement il y a eu plein d’étapes, de phases qui m’ont permis aujourd’hui d’être là devant toi et d’aider de nombreuses personnes à s’aimer. Mais au départ ça a été très, très, très, compliqué. Les premières étapes, le premier rapport que j’ai eu avec moi-même, c’était vraiment de la haine. Je ressentais beaucoup d’injustice par rapport à cette malformation parce qu’en fait je ne comprenais pas pourquoi j’avais ça, ça sortait un peu de nulle part, c’est une maladie rare en fait. Ce n’était pas connu par les médecins, ce n’était connu par personne et donc en fait j’ai fait toute une série de médecins, partout en Belgique, personne ne comprenait de quoi il s’agissait. Personne ne savait m’aider, avec ma maman on a vraiment cherché toutes les solutions possibles et imaginables. Ne serait-ce que pour comprendre ! Et puis on voyait que ça évoluait donc on se sentait vraiment impuissante. Ce qui se passe c’est que c’était aussi nouveau pour les gens, c’était totalement bizarre en fait. Une enfant avec… Et puis là aujourd’hui tu me vois, j’ai beaucoup changé. J’ai subi 7 opérations, j’ai beaucoup changé, mais c’est vrai qu’à l’époque c’était très compliqué et…. Vraiment, je ressentais beaucoup d’injustice, beaucoup de moqueries de la part des gens, et du coup moi-même j’avais beaucoup de mal à m’aimer, voilà… Et à m’accepter.
06:33 Olivier Mageren : Dans cette première phase que tu partages Alexandra. Je ne sais pas la durée que ça a pris dans ta vie évidemment, avec 7 opérations j’imagine qu’il y a eu de nombreuses années. Quand tu parles de ce que signifie l’amour, l’amour, la sexualité pour toi c’est un langage de l’amour. Et là effectivement tu parles d’incompréhension, d’injustice, de haine, ou de désamours vis-à-vis de toi. On imagine le grand écart qu’il y a entre le point de départ où finalement tu es en énorme incompréhension vis-à-vis de toi, ton corps, et puis finalement de se dire : ben la sexualité, pour toi, c’est un langage d’amour et donc il y a eu un cheminement énorme en fait qui a dû suivre ! Ce point de départ dans la vie qui est quand même très rude, qui amène beaucoup d’épreuves j’imagine. Est-ce qu’il y a eu des éléments charnières qui ont modifié cet état ?
07:14 Alexandra Tassoul : Alors. Oui, il y a vraiment eu beaucoup d’étapes, beaucoup d’éléments charnières, effectivement ça s’est fait au fil des années. Je dirais déjà que, à mes 8 ans il y a eu un événement charnière c’est que j’ai enfin rencontré un médecin qui savait de quoi il s’agissait, donc il était à Paris. Il est venu à Bruxelles, c’était un jeune médecin, j’allais être la première personne qu’il allait opérer pour cette maladie. Donc j’ai subi ma première opération à 8 ans et là moi j’ai vu cet homme comme un sauveur en fait, avec ma maman voilà on était, hyper heureuse ! Parce que la première opération a très bien fonctionné, il a permis que la grosseur que j’avais au niveau de l’œil disparaisse et devienne une simple cicatrice. Et il a aussi permis de diminuer un tout petit peu le volume au niveau de ma joue. Et en fait, ça, pour moi ça a été énorme, parce que ça a été un message d’espoir. Et j’étais déjà une guerrière, une battante dans ma vie, parce que j’avais toujours l’impression que je devais prouver des choses et je devais me donner 2 fois plus pour montrer ma valeur… Mais là. Je dirais que la haine était le moteur de ma force et à la haine c’est mêlé l’espoir. Je dirais que je me suis transformée en une petite guerrière. La première chose de mon cheminement c’est que j’ai gagné en confiance en moi parce que j’ai vraiment tout donné, toujours, pour : me surpasser, pour prouver donc… La base n’était pas des plus saines dans le sens où ce que je voulais c’était montrer que je valais quelque chose, que je n’étais pas juste cette malformation, puisque forcément j’avais beaucoup de moqueries, beaucoup de jugements, beaucoup de rejet, sans même savoir qui j’étais au fond. Et je trouvais ça injuste, et donc là, je me suis « entre guillemets » battue pour prouver que j’étais quelqu’un quand même. Chaque fois que je fais quelque chose j’essayais d’exceller, voilà, mon but dans la vie c’était : être la meilleure. Que je pratique du sport, ou à l’école, ou peu importe, enfin quoi que je fasse en fait, j’essayais de me donner à fond. Et ça, ça a été vraiment un premier élément, c’est grâce à cette opération où j’ai, je pense, repris de l’espoir. Ça m’a donné une énergie et toutes ces réussites, tous ses accomplissements que j’ai faits au fil de mon adolescence, enfin de mon enfance et de mon adolescence, ça m’a donné une grande confiance en moi. Donc je ne m’aimais pas, j’avais pas d’estime, mais au moins j’avais confiance en moi d’une certaine manière, dans certains domaines, et ça c’était déjà vraiment énorme ! Ca m’a déjà donné une belle énergie ! Ca, ça a déjà été un moment charnière, je dirais…
09:26 Olivier Mageren : Comme tu le sais, en tant que sexologue, le rapport au corps a énormément d’importance sur la sexualité d’une personne et donc le début est orienté avec ce que les gens voient en premier : le visage en fait ! Quand on se souvient de quelqu’un on a d’abord une mémoire visuelle de, reconnaître le visage, d’ailleurs il suffit parfois de changer. Un homme se déguisé en femme ou une femme un homme, ou bien au carnaval, ou changer de coiffure, ou maquillé… Et on reconnaît parfois pas quelqu’un. Donc le visage est extrêmement fort. Et d’un autre côté il y a tout le reste du corps… Qu’elle était la place pour toi du reste du corps, et entre autres, la partie génitale ou le reste de ton corps féminin ? Quel était ce lien ?
10:00 Alexandra Tassoul : Alors, justement c’est bien que tu viennes avec cette question-là parce que j’ai aussi développé un peu une obsession par rapport à mon corps. Donc c’est un peu triste à dire où, voilà, en tout cas c’est ce qui s’est passé, c’est que je me disais « bon bah j’ai déjà pas un joli visage, alors il faut au moins que j’ai un beau corps » tu vois ce que je veux dire ? C’est un peu, voilà je… J’essayais de miser « entre guillemets » sur le reste, et donc effectivement j’ai un peu eu un rapport au corps compliqué. Je me sentais grosse, pas belle et cetera, de manière générale, mais… J’essayais d’avoir un contrôle sur mon corps. De compenser avec d’autres aspect et je pense que du coup, la sexualité dans ses débuts, c’était aussi, ce n’était pas tourné vers moi c’était tourné vers l’autre. Donc mon propre bonheur, mes propres envies, mes propres désirs, je ne prenais pas du tout en compte forcément. C’était plutôt un moyen d’être aimé par l’autre. D’augmenter ma valeur pour l’autre, sans que ça n’aille dans des excès, mais en tout cas c’est clair que je ne me suis jamais moi-même mis au centre de ma sexualité à ce moment-là.
10:58 Olivier Mageren : Tu parles de haine et d’espoir qui se mélangent. Ensuite, un sentiment d’handicap où tu ressens le besoin de compenser et finalement ce rapport au corps où… Je me demandes comment ça se passait à l’intérieur de toi cette notion d’attirance que tu peux avoir vis-à-vis de toi et des autres ? Et le sex-appeal, tu vois le côté d’avoir une certaine fierté malgré tout et de se sentir attirant ! Dans le rapport à l’autre il y a quand même ça, il y a l’attirance ou le rejet, l’ouverture ou la fermeture, l’ouverture ou la peur. Et donc c’est omniprésent finalement dans ta vie avec ce rapport au corps. Qui est quand même notre premier ancrage, et de présence à l’autre, et à soi !
11:27 Alexandra Tassoul : Alors, ce que j’ai pu observer avec le recul, avec les années, c’est que, en fait… Donc moi je ne m’aimais pas et je ne me sentais pas attirante. Et je n’étais pas non plus forcément attirée par les autres. En fait c’est, quand tu as une blessure de rejet, ben… On voit, Lise Bourbeau tu vois, elle explique le triangle, c’est : je me rejette, les autres me rejettent, et je rejette les autres. Et moi j’étais un petit peu dans ce rapport-là par rapport aux autres, c’est à dire que je me jugeais mais je pense aussi que je jugeais les gens. Donc physiquement je veux dire hein ? J’étais assez critique, bon heureusement je n’ai jamais fait de remarques désobligeantes à qui que ce soit. Mais je sais que moi par exemple j’avais un focus sur les jambes, voilà, il faut absolument avoir des fines jambes et cetera. Le truc que je regardais chez les gens, c’était leurs jambes. J’étais critique « entre guillemets », je me disais « Ok » et cetera. Je ne me sentais pas attirante, je me jugeais, et en même temps je ne voyais pas le côté attirant chez les gens. Et je les jugeais d’une certaine façon, et encore une fois je le dis, c’était dans ma tête. Et après, il y avait toujours cette échelle où je les trouvais quand même mieux que moi… Mais le rapport, je veux dire sain, d’attirance, l’amour et cetera… Je ne pense pas qu’il était présent à ce moment-là !
12:32 Olivier Mageren : Qu’elle a été l’étape suivante dans ton parcours ?
12:35 Alexandra Tassoul : Alors l’étape suivante qui s’étale sur plusieurs années c’est que je te disais, à 8 ans je me suis fait opérer pour la première fois, ça a fonctionné, c’était génial voilà, c’était un beau message d’espoir. Et ensuite, au total, je me suis fait opérer donc 7 fois, donc seulement 2 fois où on a eu des résultats. Donc la première et la dernière fois ça a fonctionné, toutes les autres fois ça n’a pas fonctionné. Mais il faut savoir que c’est une opération lourde en termes de convalescence. J’étais après, pendant un mois, vraiment pas bien. C’était un produit spécial qu’on m’injectait dans les veines et cetera, qui faisait réagir mes veines. Parce qu’on ne peut pas faire de la chirurgie esthétique, c’est trop compliqué, c’est vraiment un système compliqué les veines, c’était pire que mieux si simplement on les retirait. On m’injectait une sorte de produit, qui faisait réagir très fort les veines et qui les faisait gonfler. Pendant un mois je me retrouvais le visage totalement déformé. Deux fois plus gonflé que d’habitude et c’était très, très, très, douloureux. Je savais à peine manger, à peine passer un spaghetti dans ma bouche. Ce que je t’explique là c’est que y a eu deux opérations qui ont fonctionné et le reste n’a pas fonctionné, c’était beaucoup d’espoir que j’avais posé, et ensuite j’ai dû me faire à la réalité. Voilà même si j’avais très envie que ça fonctionne, ça n’a pas fonctionné la majorité du temps. Et en fait, au fil des années, donc la dernière opération que j’ai eue, je l’ai eue à je pense 21 ans. Je me suis vraiment dit qu’il était temps d’arrêter de me battre. Je t’ai parlé de la guerrière en moi, elle a pris beaucoup de place, je me suis beaucoup battue, donc j’avais comme je l’ai dit beaucoup de haine et cetera qui m’ont donné une force et beaucoup d’espoir… Enfin bref, j’étais dans une, dans un combat en fait, un combat contre moi-même, par rapport à mon corps comme je l’ai dit et cetera. Et aussi par rapport à cette malformation que j’essayais de combattre avec des opérations quoi, qui étaient super dures. J’ai dû en fait arrêter parce que je devais être juste réaliste et me rendre à l’évidence ça ne fonctionnait pas. J’ai juste décidé de m’accepter, « juste » entre guillemets. Ça a été juste énorme, ça m’a pris des années, mais l’étape d’après, donc après avoir augmenté ma confiance en moi et m’être « donné » entre guillemets un moteur pour prouver, pour compenser et cetera… J’ai décidé d’arrêter de me battre et vraiment de m’accepter pleinement, tel que j’étais. Et ça c’est vrai que ça a été vraiment une étape énorme, dans mon parcours.
14:52 Olivier Mageren : Merci. Une fois que quelque part tu arrête de combattre en fait, comment se passe cette transition dans la rencontre vers toi-même et vers les autres ?
15:00 Alexandra Tassoul : Alors ce que ça a changé c’est que j’essayais plus trop de me cacher puisque, comme je te disais, enfin j’étais vraiment une enfant qui frôlait les murs et cetera, une adolescente pareil. Là j’essayais plus de me cacher, j’essayais juste de dire « bon bah je suis moi, je suis Alexandra, je suis comme ça, j’ai cette malformation, c’est comme ça donc… ». Déjà la première chose c’est que j’ai arrêté de me cacher, de qui j’étais. Et j’ai cherché à rencontrer des personnes qui m’acceptaient aussi, puisque forcément quand on ne s’aime pas, on attire aussi des personnes qui ne nous aiment pas et qui nous renvoient les parties de nous-mêmes qu’on aime le moins, qui nous confirment en fait ce qu’on pense de nous. Et donc je pense que déjà j’ai cherché à rencontrer des personnes qui m’acceptaient, qui étaient plus ouvertes, plus tolérantes, et ça c’est ce que ça a changé en tout cas dans mon rapport aux autres et dans mes relations. C’est vraiment de pouvoir juste dire « bah voilà, je suis qui je suis, c’est comme ça ». Ce n’était pas encore de l’amour de moi, ce n’était pas encore de l’estime de moi, mais au moins je m’acceptais déjà au lieu de me haïr et cetera
15:54 Olivier Mageren : Là tu es déjà à plus de 20 ans. Quelle est la place finalement de ta sexualité dans ce rapport au corps ? Comment elle émerge en fait ? Ou comment tu l’accueilles, comment elle s’exprime, comment tu l’as fait vivre ? Ou est-ce qu’il y a aussi ce rejet vis-à-vis de cette partie de toi ou… En combat, en guerrière, ou bien elle a une place différente dans ta vie ?
16:12 Alexandra Tassoul : A ce moment-là je ne me pose aucune question sur ma sexualité. En fait, voilà, je ne me demande pas ce que j’aime, ce que je n’aime pas, ce dont j’ai besoin, ce dont je n’ai pas besoin, à mes désirs et cetera. Je la vis comme ça, comme quelque chose qu’on te dit « bah voilà tu dois marcher pour aller à tel endroit », ben on me dit « je le fais », je le fais. On me dit c’est normal d’avoir de la sexualité dans un couple, ben voilà, j’ai de la sexualité. Je n’y prends pas de plaisir ou en tout cas je ne m’y retrouve pas parce que je ne suis pas connectée en fait, je le vis sans le vivre pleinement je dirais, c’était… Voilà, en tout cas, sans me mettre au moins au premier plan et sans m’écouter.
16:47 Olivier Mageren : Et comment ensuite tout ça se transforme ?
16:49 Alexandra Tassoul : Alors la suite c’est un mélange d’événements. Et de rencontres, et de prise de conscience, de travail sur moi, beaucoup. J’ai fait des études de psycho, j’ai fait des études de sexo. Bah voilà, j’ai beaucoup essayé de travailler sur moi-même et de réfléchir et donc tout ça a vraiment nourri, nourri mon évolution et mon chemin vers l’estime de moi et l’amour de moi. Mais je dirais que ça s’est fait en parallèle, mon estime de moi-même a commencé à augmenter, parce que j’étais avec des personnes qui me valorisaient et moi-même j’arrivais en fait à reconnaître ma valeur. Je réussissais bien à l’université, j’avais des personnes qui voyaient mes potentiels et cetera, et en fait tout ça, ça se nourrit. Parce que, quelque chose que j’ai vraiment envie de partager aujourd’hui, c’est que le travail d’estime de soi, d’amour de soi et de confiance en soi, c’est un équilibre à trouver entre soi et entre l’autre. C’est vraiment, j’ai ma responsabilité mais il y a aussi une aide possible, une responsabilité de l’autre. Personnellement je commençais à prendre conscience de ma valeur parce que je réussissais, parce que je fais des chouettes choses, parce que les gens me valorisaient et en fait… A la fois moi je reconnaissais, à la fois je prenais conscience, et à la fois j’avais des retours positifs. J’ai notamment eu un mentor comme ça à l’université qui m’a vraiment beaucoup valorisée, qui a cru en moi, qui m’a tiré vers le haut, qui m’a donné des responsabilités, j’ai eu plusieurs personnes comme ça sur mon chemin. Qui ont vraiment placé leur confiance en moi, qui m’ont dit « Ok, c’est bon, je te sens super compétente et cetera, on va y aller ». Tout ça, ça a vraiment nourri mon estime et puis moi-même je me suis dit « bah oui, au fait, je suis quelqu’un de bien quoi, j’ai de la valeur » et tout ça c’est chouette. Ça, ça s’est fait au fil des années, dans ma relation à moi, les prises de conscience que j’avais plus les personnes qui m’entouraient, qui étaient vraiment super bienveillantes et cetera. Et en parallèle à ça ben, en fait, le fait de prendre conscience que je suis quelqu’un qui a de la valeur. Ça m’a aussi fait prendre conscience que j’ai des limites, que j’ai des besoins, que j’ai des envies, et j’ai commencé tout doucement à les écouter. Et ça, ça m’a permis de m’affirmer. Donc là je me suis rendu compte que j’étais dans une relation, par exemple, qui ne me convenait pas. Où je me suis dit « Ah en fait c’est ça l’amour, en fait c’est ça que je veux, en fait c’est ça et… » et là j’ai commencé tout doucement à m’écouter et à faire des choix pour moi. Ça a été aussi la première étape par rapport à l’amour de moi, c’est de me respecter. Déjà j’avais pris conscience que j’avais de la valeur, que j’étais quelqu’un de bien. A ce moment-là je me suis dit « Ok, qu’est-ce que j’aime, qu’est-ce que j’ai besoin ? » et là j’ai commencé à me respecter, à prendre en considération mes envies, mes besoins, et poser des choix concrets pour les respecter donc concrètement bah une rupture par exemple hein ? C’est de dire « bah Ok cette personne en fait elle est très bien, mais elle n’est pas pour moi parce qu’en fait ça ne répond pas à mes besoins » l’amour de soi, c’est pouvoir faire passer ses besoins, avant les désirs des autres. Alors que l’égoïsme c’est faire passer ses désirs avant les besoins des autres. Je vais répéter ça : l’amour de soi c’est faire passer ses besoins avant les désirs des autres et c’est ce que j’ai fait concrètement. Pour la première fois, là je commençais à faire passer mes besoins, ce qui était important pour moi, avant les désirs des autres. Et là ben dans ma sexualité, voilà, j’ai totalement changé quoi, en fait je me suis vraiment posée des questions. Je me suis dit « Ah mais en fait qu’est-ce que j’ai envie ? Qu’est ce qui est important pour moi ? Qu’est-ce qui me plaît ? Quelles sont les personnes qui m’attirent ? Est-ce que c’est un homme ? Est-ce que c’est une femme ? Est-ce que c’est les deux à la fois ? ». Enfin pas les deux en même temps mais dans le sens – Est-ce que c’est les deux à la fois ? – Ou encore ça pourrait être les deux en même temps, peu importe… Mais c’est le fait de se poser déjà la question et de respecter aussi ce que j’ai découvert sur moi, ça m’a vraiment aidé, c’était aussi un premier acte je dirais d’amour de moi-même !
20:16 Olivier Mageren : Merci de tous ces partages c’est très intéressant de faire cette distinction entre désir, besoin, amour de soi, égoïsme. Et puis de voir qu’il y a un cheminement parallèle entre ta vie extérieure et la vie aussi sexuelle. Que les deux sont intimement liés, que tu commences à être créatrice en fait, à ce moment-là, de qui tu es aussi dans la vie affective et sexuelle, et d’écouter tes besoins, et de poser tes questions. Et quelles sont les questions que tu as eues et les réponses en fait ? Qui ont peut-être été clefs dans ce cheminement, qui peuvent aider peut-être les auditeurs, auditrices ?
20:44 Alexandra Tassoul : Je pense que la question que j’avais c’était : est-ce que je suis aimable ? Exactement telle que je suis ? Là, je te dis, bah j’arrivais à avoir confiance en moi, j’arrivais à m’estimer… Mais au niveau de l’amour de moi-même c’était en chemin mais ce n’était pas total, tu vois ce n’était pas un amour inconditionnel de moi-même. C’est à dire que j’arrivais à aimer mon corps un peu plus, j’arrivais à aimer mes yeux, mes cheveux et cetera… Mais je n’aimais toujours pas mon visage. Je l’acceptais, mais je ne l’aimais pas. Ma question c’était toujours « Est-ce que je vais un jour trouver… », « Est-ce que je vais un jour m’aimer pleinement ? Est-ce que quelqu’un va un jour m’aimer pleinement ? », voilà. C’était plus ou moins ces questions-là, il y en avait d’autres mais… En tout cas me concernant c’était vraiment ça. Et là j’ai fait une rencontre d’une personne qui, justement, c’était un énorme moment charnière par rapport à mon amour de moi-même, c’est que cette personne elle a vraiment aimé qui j’étais pleinement. Donc c’était limite un atout, voilà, mon visage, ma malformation, à ses yeux, c’était la plus belle chose du monde, c’était magnifique. C’était beau, c’était la vie, c’était… Et en fait elle a aimée pleinement qui j’étais avec cette malformation et quand je l’ai vu m’aime comme ça… Ben je me suis dit « bah oui en fait, je suis aimable, mais oui en fait c’est beau, oui en fait y n’a pas de problème à être différent, je peux m’aimer pleinement et inconditionnellement ». C’est pour ça aussi que j’insiste sur le fait que c’est un équilibre entre soi et l’autre. Parce qu’on est des êtres sociaux et l’enfant par exemple quand il naît, il ne sait pas marcher seul, il a besoin de son parent, il a besoin de quelqu’un pour l’aimer, pour l’aider, pour le sécuriser, et il faut pas négliger cet aspect-là ! En tout cas dans mon parcours je l’ai bien remarqué, il ne faut pas négliger le besoin aussi d’être valorisé, d’être aimé par les autres. Alors on n’est pas toujours né dans un environnement qui le permet, mais c’est aussi de l’amour pour soi. Et ça je le dis en toute humilité, je pense que c’est plus facile à dire qu’à faire, mais c’est aussi de l’amour pour soi de pouvoir se dire « là je suis dans un environnement ou avec des personnes qui ne me valorisent pas où qui ne m’aiment pas à ma juste valeur » et m’aimer moi-même, comme j’ai dit, c’est pouvoir faire passer mes besoins avant les désirs des autres et donc là ça pourrait être bah justement m’éloigner, de ces personnes-là. Et justement essayer de chercher des personnes qui m’aiment pour qui je suis, qui m’aiment inconditionnellement, qui me valorisent et cetera. Il y a vraiment pour moi cet équilibre à trouver entre le chemin que je fais avec l’autre et le chemin que je fais avec moi. Et en même temps c’est pas un chemin donc, comme je dis, qui est tout seul hein ? Je pense que seul c’est compliqué aussi ! On a besoin de se sentir aimé, valorisé, regardé, par les autres. Mais ça ne doit pas être excessif, c’est à dire que toute la responsabilité ne doit pas être sur l’autre. Parce que ben dans mon pas par exemple, je pourrais me dire : « Cette personne m’aime, mais si il où elle me quitte, oufff ça va être la fin du monde, qui va m’aimer ? » enfin tu vois ce que je veux dire ? Si tu mets toutes les responsabilités sur l’autre s’est très compliqué. Et à la fois toute la responsabilité sur toi même c’est pas possible, c’est un petit peu un équilibre à trouver entre cette relation et cette co création de l’estime et de l’amour de soi.
23:41 Olivier Mageren : Quand on s’est rencontré il y a quelques jours, tu disais effectivement : on est un animal particulier, l’être humain quand on nait bien évidemment on n’est pas autonome, on sait pas marcher, on est dépendants finalement du réseau qui est autour de nous. De nos parents ou des personnes qui prennent soins de nous contrairement à certains animaux, ben voilà ils naissent et puis ils galopent hein… Ils sont… On est des êtres relationnels avant tout. Et sur ton parcours il y a eu des personnes clefs, tu parlais du chirurgien qui t’a donné espoir, ce mentor à l’unif qui a donné confiance et plus de valeur à toi-même, une rencontre amoureuse qui te permet de t’aimer davantage. Et de se rendre compte que, on peut être cette personne en fait, pour soi, et pour les autres et qu’en fait à chaque instant de notre vie on a un rôle presque essentiel et critique. Critique dans le sens fondamental, pour soi et pour les autres, on peut être sans le savoir un mentor ou quelqu’un d’inspirant qui témoigne par une manière d’être un amour fort. C’est beau de le re conscientiser, en tout cas merci de le partager, c’est vrai que choisir les personnes autour de nous c’est fondamental quoi, pour se faire du bien !
24:32 Alexandra Tassoul : Oui et c’est choisir. Le mot que tu as utilisé il est important ! Là ça fait partie de ma responsabilité, je ne suis pas responsable des autres et de ce qu’ils me disent. Il y a des personnes qui effectivement me trouveront pas jolies et cetera ou qui ne vont pas m’aimer. Mais y en a d’autres qui vont m’aimer, et ça c’est ma responsabilité de me tourner vers ces personnes-là. Et c’est important aussi d’en prendre conscience. En fait, je suis d’accord avec toi, on peut être cette personne là pour soi-même. Et ça c’est ce que j’apprends aux personnes que j’accompagne. C’est être cette personne pour soi, tu vois ? Tous les langages, tous les différents langages de l’amour, c’est de les tourner vers soi. Toute la compassion, les valorisations qu’on peut donner, l’amour, le réconfort, le soutien qu’on donne aux autres, c’est le tourner vers soi. Mais il n’y a pas que ça, il y a aussi les autres qui nous entourent parce que comme je l’ai dit on est sociaux, on est des êtres sociaux, et c’est bien choisir aussi son entourage. Même si ce n’est pas toujours évident, même si ce n’est pas toujours facile, enfin c’est d’ailleurs très souvent compliqué… Mais c’est un profond acte d’amour de soi de pouvoir se respecter aussi dans ses relations.
25:26 Olivier Mageren : Tu cherches les personnes qui te font du bien et tu choisis les personnes avec qui tu veux être, et puis tu choisis les personne avec qui effectivement tu as une vie amoureuse. La vie amoureuse va souvent de pair avec une vie sexuelle dans notre société, dans notre culture. Et les deux ne sont pas nécessairement aussi simples : ça peut très bien se passer dans la vie affective et pas nécessairement arriver à s’affirmer, à faire ses choix, exprimer ses désirs, ses limites, ses besoins, dans la vie sexuelle. Ou de se dire « Tiens, on se convient dans certains domaines de la vie, style de vie professionnelle ou autre » et puis finalement la vie sexuelle ce n’est pas en adéquations ou en tout cas on n’est pas aussi nourri. Comment les deux étaient en lien en fait ?
25:58 Alexandra Tassoul : Les deux sont en lien et pour moi les deux se travaillent, entre guillemets, en parallèle. Donc là je parle juste de mon histoire personnelle mais à partir du moment où j’ai pu m’aimer, me respecter, me faire confiance, me valoriser, me dire que je suis aimable, que je mérite des choses, voilà comme « tout le monde » entre guillemets, que je mérite le bonheur et cetera… ça a été aussi bien dans ma vie amoureuse, donc sentimentale, que dans mes relations intimes. Ça s’est fait un petit peu de pair, je ne sais pas si ça s’est fait exactement au même moment, mais en tout cas pour moi ce sont des chemins parallèles. Je remarque aussi vraiment avec mes patients et mes patientes que c’est un chemin qui se fait en parallèle. Quand la personne commence à prendre conscience de sa valeur, commence à se mettre au centre, ça se passe automatiquement aussi dans sa sexualité, parce qu’en fait alors il y a une dissonance. C’est à dire « Ah Ben, je me respecte mais par contre là… » dans cet aspect de moi qui est en fait, central hein, la sexualité c’est un système des plus centrales quoi, ça touche à tout. Si dans cet aspect-là de notre vie on ne se respecte pas, ça créé vraiment une dissonance et un mal-être. En général, si ça ne se fait pas au même moment, en tout cas ça finit par arriver aussi ce moment où on arrive à être soi-même et s’aimer aussi dans sa sexualité parce que sinon on n’est pas complètement soi et ça crée vraiment quelque chose de désagréable à l’intérieur.
27:11 Olivier Mageren : Merci. Et actuellement, tu penses que tu en es où dans ta vie sexuelle ? Dans quelle dynamique, quelle énergie, quelle étape ? Ou quels sont les étapes qui sont à venir ou auxquelles t’aurais, ou tu aspires, ou qui sont déjà là en train de se déployer ?
27:23 Alexandra Tassoul : Actuellement justement j’ai fait un beau travail je pense, une belle évolution par rapport à mon rapport à moi-même. Et ça, ça me permet de me sentir libre. C’est à dire libre de rentrer ou pas dans des cases, de rentrer ou pas dans des normes, de respecter mes envies, mes besoins, donc là je sens au niveau de ma sexualité vraiment une profonde liberté. Et cette liberté là ça donne la place justement au plaisir, au désir, à la légèreté, à s’écouter soit, à être présente à l’instant présent, au moment présent. Donc là le mot qui me vient ouais c’est vraiment la liberté, et tout ça ben pour… Ben forcément ça provoque de l’épanouissement !
27:54 Olivier Mageren : Merci. Je me demande ce qui a guidé ton choix de devenir sexologue, est-ce qu’il y a un lien avec ta vie sexuelle ?
28:00 Alexandra Tassoul : Alors ma réponse va peut-être décevoir. S’il avait existé une section « amourologie » je l’aurais suivie parce que c’est vraiment plutôt l’aspect des relations amoureuses qui m’intéressaient. Même si pour moi la sexualité et l’amour c’est extrêmement lié. Mais ce sont vraiment plutôt les relations amoureuses qui m’ont motivé à faire de la sexologie. Et puis quand j’ai fait ces études-là, ben ça m’a aussi ouvert et en fait c’est plutôt une découverte. Ce n’était pas une recherche à la base, je ne dirais pas que je me suis retrouvé là par hasard mais…. En tout cas mon objectif ce n’était pas forcément d’être sexologue, c’était plutôt d’être thérapeute de couple. Et puis ben voilà je me suis hyper fort intéressée à ce sujet, ça m’a passionné, mais toujours en lien vraiment avec l’amour et les sentiments.
28:39 Olivier Mageren : Merci. Y aurait-il autre chose que t’as envie de partager aujourd’hui sur ton histoire qui à peut-être été un élément important ?
28:46 Alexandra Tassoul : Alors ce que j’ai envie de partager c’est que ce chemin que je te raconte, que je vous raconte, il m’a pris plusieurs années. Et j’ai peut-être fait un petit peu à l’envers, en tout cas un petit peu par ci par là, c’étaient des étapes décousues. C’est seulement avec du recul que je peux mettre des mots et que je peux évaluer, que je peux voir tout ce qui s’est produit. Mais aujourd’hui il n’est plus nécessaire je pense de faire tout ce chemin. De passer par toutes ces étapes et je pense que ce que j’ai pu voir dans les études scientifiques qu’on a faites à l’UCL ou dans mes consultations, dans mes accompagnements, c’est qu’en fait l’amour de soi c’est la clé. Que ce soit pour avoir confiance en soi, pour avoir une bonne estime de soi, pour pouvoir s’affirmer, oser, c’est déjà juste de s’aimer inconditionnellement, quoi qu’il arrive. De pouvoir se dire « Je suis un être aimable, donc que je réussisse ou que j’échoue, je m’aime. Qu’on m’aime ou qu’on ne m’aime pas, moi je m’aime. En fait, quoi qu’il arrive dans ma vie je m’aime » et en fait ça paraît simple à dire. Mais justement moi je parle beaucoup des 5 langages de l’amour de Gary Chapman, avec les personnes que j’accompagne, et je les invite vraiment à voir en fait quels sont les langages de l’amour que vous appliquez dans votre couple, ou en tout cas dans la relation avec les autres. C’est à dire quels sont les langages de l’amour que vous préférez, que vous utilisez. Et quels sont ceux que vous aimez recevoir de l’autre. Alors déjà les gens un petit peu, voilà, se questionnent un petit peu, tout ça, et ensuite c’est l’idée de se dire « Ok, maintenant comment, au quotidien, on peut retourner ce langage, ces différents languages ver soi ? ». Comment est-ce que prendre un bain, c’est s’aimer. Comment est-ce que dire « Non, désolé je ne sais pas aujourd’hui venir, voilà j’ai un empêchement » c’est aussi s’aimer. Comment est-ce que dire non c’est s’aimer. S’offrir un cadeau, c’est aussi s’aimer. S’offrir un bouquet de fleurs, peu importe, se faire plaisir, se respecter, voilà… Comment est-ce que se mettre de la crème sur le corps c’est aussi s’aimer. Et c’est tout simplement par des petits gestes, parce que j’ai remarqué que, la théorie c’est très bien, l’action c’est beaucoup mieux. Et donc c’est vraiment déjà ancrer au quotidien, par des gestes d’amour de soi, et pour moi je fais voilà souvent référence aux 5 langages de l’amour de Gary Chapman.
30:45 Olivier Mageren : Merci pour cette très beau témoignage, très inspirant. Qui à mon avis va toucher le cœur de beaucoup de personnes. On sent toute cette sensibilité et cette intégration de l’amour dans ta vie comme un élément central depuis ta naissance. Pour terminer ce podcast, est-ce que tu aurais un cadeau à offrir aux gens, un conseil en fait. Quelque chose, tu parles effectivement des langages de l’amour mais est-ce qu’il y a autre chose, par exemple, qui pourrait aider les gens en fait ?
31:06 Alexandra Tassoul : J’ai envie de dire on est tous uniques, on est tous différents, alors moi là je le vois hein ? Moi je suis différente physiquement et en fait j’encourage vraiment chacun à pouvoir vivre cette différence pleinement et en faire une force et une mission. Moi concrètement là, tu le vois, mon métier c’est d’aider les gens à s’aimer. Pourquoi ? Parce que j’ai eu ce parcours là et donc en fait je le vis comme un cadeau aujourd’hui, vraiment. Ce n’est pas de la blague là, vraiment, je me dis « bah oui, je suis née pour ça et c’est génial et je le vis avec plein de gratitude, je suis contente d’avoir eu cette malformation parce que ça m’a donné de l’empathie, de l’amour pour les autres et cetera » et enfin ça m’a donné une mission de vie. Et en fait, je pense que chacun, chacune, à sa différence, à son unicité, et on essaye malheureusement un petit peu dans la société de gommer tout ce qui dépasse, tout ce qui ne rentre pas dans les cases… Or, on est tous géniaux. On a tous notre unicité et c’est vraiment pouvoir utiliser cette différence. Arrêtez de la masquer, arrêtez de la cacher, de ne pas l’aimer. Juste essayez de voir en quoi ces différences-là, cette unicité, cette force, cette sensibilité, elle peut être utile. Pour les autres, pour soi, comment est-ce que ça peut devenir un projet, une mission, quelque chose de plus grand que soi ? Parce que je pense qu’il n’y a pas de hasard et moi personnellement si je suis née avec ce visage, il n’y a pas de hasard je pense ! Je pense que c’est le cas pour tout le monde ! En fait ça peut être une unicité dans le physique, ça peut être une unicité dans le mental, dans le psychologique, mais aussi dans ce qu’on vit. Comment est-ce que mon épreuve de vie, qui est unique, qui est compliquée, qui est douloureuse, je peux l’utiliser en faire une force ? Ce n’est pas juste comment je suis différente physiquement, c’est vraiment en fait utiliser toutes les parts d’ombre pour en faire de la lumière et… C’est ça qui fait la beauté en fait, toutes les personnes qui ont des projets incroyables, en général quand on regarde un petit peu leur histoire, il y a quelque chose de très, très, fort derrière, elles ont su justement en faire des forces ! Donc j’ai envie de dire, arrêtez de vous battre contre ce qui est compliqué, douloureux, et juste essayer de – enfin « juste » – c’est possible, je dirais, d’en faire un levier pour répandre la joie et l’amour !
32:58 Olivier Mageren : Merci beaucoup, merci, merci. J’imagine à quel point ça peut transformer la vie de quelqu’un d’aller à la rencontre de soi. De découvrir à quel point on est unique, de faire cette introspective de notre unicité, de notre histoire sexuelle d’une part mais de tout ce qui fait nos expériences de vie et notre personnalité, et de l’offrir. Se l’offrir à soi et s’autoriser à être qui on est, comme ça on autorisé les autres à être qui ils sont dans leur unicité. Et de célébrer en fait de voir chaque unicité autour de soi plutôt que de voir des copiés-collé de normes, de standard, ou du politiquement correct, ou de quoi que ce soit qui correspond à votre culture. Il suffit parfois de voyager dans d’autres pays et se rendre compte à quel point tout est tellement relatif. Quand on est perdu dans le langage, dans le style, dans les cultures, dans les traditions et de se dire « Allez, soyons soi-même quoi », c’est tellement beau. Merci beaucoup, merci. Est-ce que tu souhaites faire une gratitude à quelqu’un par rapport à ton parcours de vie ?
33:45 Alexandra Tassoul : Je souhaite, j’ai beaucoup de gratitude envers ma maman qui est une femme exceptionnelle. Et qui justement, elle, m’a toujours aimé de manière totalement inconditionnelle – Et mon papa aussi hein je ne l’oublie pas – Mais je dirais que ma maman, elle m’a toujours vraiment soutenu de A à Z, dans tout. Tout ce parcours et en fait je me suis seulement rendu compte il y a quelques temps que c’était ça l’amour inconditionnel. C’était celui qui était juste sous mes yeux mais je n’étais pas capable de le voir et donc beaucoup de gratitude pour ma maman pour tout cet amour incroyable qu’elle m’a toujours donné.
34:16 Olivier Mageren : Ah j’imagine le cadeau que ça va faire pour ta maman d’écouter ça, et à toutes les mamans d’ailleurs qui peuvent se reconnaître dans l’accompagnement de leurs enfants. Merci beaucoup pour ce partage Alexandra.
34:25 Alexandra Tassoul : Merci surtout à toi Olivier d’exister, de faire ce podcast qui est juste incroyable, magnifique et tu vois là clairement tu partages beaucoup d’amour. Et je pense que tu dois aussi en recevoir, parce que c’est ce qui est normal entre guillemets, enfin moi j’ai envie en tout cas de t’en donner beaucoup. Et j’invite vraiment chaque personne qui écoute ce podcast à simplement se positionner, voir si c’est juste dans leur cœur ou pas, de te soutenir aussi. Parce que je pense que c’est ça aussi l’amour, c’est donner, recevoir. Sachez simplement que pour financer ce podcast, pour qu’il existe, il y a besoin d’avoir des dons, il y a besoin d’avoir des gens qui justement soutiennent d’une manière monétaire, financière. Donc si ça vous tente, si ça vous parle, si vous sentez que, voilà, que c’est juste pour vous, que vous avez ce besoin, cette envie : ben n’hésitez pas aussi à soutenir le magnifique podcast d’Olivier. Il y a toutes les informations sur le site internet, alors même 2€, 3€, peu importe… Voilà, mensuellement ou pas, ce qui semble juste pour vous. Mais simplement n’hésitez pas aussi à aller soutenir son podcast qui est vraiment…. Enfin, juste un bel acte d’amour en soi. (Olivier Mageren : Merci)
35:27 Générique outro sur tapis musical :« Entr’Nous (voix féminine Katalin) ; Entr’Nous (voix masculine Olivier), le podcast (Katalin) pour parler (voix masculine Michel) de sexualité (Olivier) par vous (Michel), avec vous (Olivier), pour vous (Katalin) »
Grâce à vos dons nous pouvons, chaque fois que nous en aurons les ressources (et cela reste une volonté), proposer une version écrite aux personnes souffrant de surdité ou de difficultés d’audition. Dans cette transcription vous retrouverez également un séquençage plus précis et complet de l’épisode. Merci !
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